Le nouveau corsaire, René Jouglet, 1924 -,, bibliothèque Plon,

Le nouveau corsaire, René Jouglet  .- Collection Bibliothèque reliée Plon numéro 134 - 

"Chaque après-midi, durant des heures, assis au sommet de la plus haute dune, fumant et rêvant, je restais à regarder la mer. Elle m'envoûte : son eau couleur d'absinthe, au larde de Douvres, souvent se décolore, la ligne d'horizon s'efface, c'est l'image et la fascination du vide. 

Le reste du temps - et lorsque je ne nageais pas de conserve ave Pétrus, le douanier, qui gros et gras, tient l'eau comme une bouée - je m'allongeais dans une combe et je m'occupais à parcourir les revues et les brochures qui traitent de mon art d'ingénieur, puis, poussant volontiers plus avant, je me nourrissais soit des controverses de la physique relative, soit des travaux de l'école de Vienne et de Genève touchant à la subconscience, premiers coups de sonde jeté par de passionnés chercheurs dans l'océan inexploré de la connaissance. 

C'était l'époque de mes vacances. L'invasion annuelle des messieurs en flanelle et des dames en sweaters - filets de tennis, teams de polo et toutes les accentuations nasales - venait d'interrompre ls recherches que je poursuivais à la Panne sur l'utilisation des marées et comme je me trouve plus amoureux de la courbe noire d'un dauphin dans la courbure glauque d'une vague que de cinquante maillots, même collants, à mi-corps dans l'eau, ce village du bord de mer où je m'étais retiré provisoirement, cette auberge où la chère est bonne, la propreté flamande, me composaient ensemble, on ne peut mieux, le cadre d'une vie naturelle, fort paisible et bien équilibrée.

Un matin, comme j'achevais de me rhabiller, après le bain, au poste-frontière, je vis ceci : Au large de la Panne, une voile se détachait, encore lointaine.

Mirage ordinaire, elle parut louvoyer par le jeu de dés des cabines, balancée de droite et de gauche avec une indécision, une maladresse lente, dégagée, elle fila. Je la vis à la hauteur de Ghywelde, pareille à l'aile verticale d'un goéland bousculé par la tempête ; à la hauteur de Bray, on l'aurait crue sur le sable. Je hélai Pétrus qui s'occupait à tailler dans une peau de chien les lanières de ses bottines. Il leva les yeux : - C'est l'auto à voiles."

éditions Librairie Plon Les Petits-Fils de Plon et Nourrit 1924.   #Bibliothèque reliée Plon,

Description : livre broché couverture cartonnée, avec jaquette, 253 pages, format 16 cm x 11 cm. bon état.